Lait noir / Elif Shafak

Belle découverte que cette talentueuse écrivaine turque qui, au travers d’une autofiction, raconte ses questionnements sur la maternité, puis le vécu de celle-ci, plus noir que rose.

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2Elif Shafak raconte ses questionnements sur sa vie de femme et d’écrivaine. Elle se demande notamment si cette profession est vraiment compatible avec la maternité en citant l’exemple de nombreuses auteures telles que Virginia Woolf, Zelda Fitzgerald ou Sylvia Plath. Mais, elle n’est pas seule à nous livrer ses pensées, toutes les minis-femmes qui l’habitent mettent leur grain de sel à la réflexion: Miss Cynique Intello, Dame Derviche, Maman Gâteau, Miss Intelligence Pratique, etc. Dans ces conversations cacophoniques, Elif se sent parfois perdue. Mais ce qui doit arriver, arrive. Elif tombe amoureuse et fait un bébé. Malheureusement, la grande joie attendue se transforme en une longue dépression.

1C’est un livre vraiment agréable à lire et bien écrit. De plus, le fait de raconter ses contradictions intérieures au travers de petits personnages féminins est original et assez représentatif des dilemmes philosophiques que l’on peut avoir au quotidien. À la lecture de «Lait noir», on se rend très vite compte que l’auteure est extrêmement calée en matière de littérature, de Gender Studies et de spiritualité orientale. À travers son livre, Elif Shafak cherche à désacraliser la maternité. Elle explique que dans de nombreux pays, tel que la Turquie, la maternité n’est quasiment pas critiquable et les femmes se doivent d’être parfaitement heureuse d’être enceintes, ne pas se plaindre et ne penser qu’au bébé. Les doutes et la dépression sont tabous. Pour Elif Shafak, s’ajoute encore le fait que la profession d’écrivain, si prenante au quotidien, semble difficilement conciliable avec la fonction de mère, tout autant envahissante.

Cependant, même si c’est une très bonne lecture, fluide et réflexive, la fin reste assez décevante. Effectivement, au lieu de donner une fin littéraire au livre, l’auteur nous fait une vulgarisation des connaissances sur la dépression post-partum. Je n’ai pas vraiment compris cette démarche car si le lecteur souhaitait lire quelque chose d’explicatif sur la dépression, il ne lirait pas un roman, mais plutôt un documentaire.

En résumé, une lecture très agréable, en plus d’être intelligente, malgré une fin pas très adéquate. À recommander pour les personnes ayant peu de connaissances sur les études genre, car les notions qu’elle apportent sont très bien amenées.

Elif Shafak, Lait noir (titre original: Siyah Süt), chez Phébus et 10/18, 2009.

3 réflexions sur “Lait noir / Elif Shafak

  1. Ca a été le premier livre que je lus de cette auteure que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. J’en suis littéralement tombée amoureuse. J’aime sa façon d’aborder des sujets difficiles avec une apparente naïveté, une fraîcheur faussement inconsciente. La bâtarde d’Istanbul m’a aussi beaucoup plus, quoi que ne détrônant pas Lait Noir. J’entame en ce moment Crime d’Honneur, nous verrons bien.

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